Pourquoi donc une vieille photo a-t-elle ainsi le don de m’émouvoir ? Peut-être parce qu’elle évoque un temps révolu, une vie qui paraît différente, plus calme, plus intense aussi et plus propice à la rêverie dans la langueur des heures qui s’étiraient. Elle est pour moi irrémédiablement liée au monde de l’enfance et apporte sa dose de mélancolie. Réservoir à sensations, chacun y puise ce qu’il veut et se raconte ses histoires.
C’est ce qui se produit lorsque je feuillette le livre Paris du temps perdu publié par les éditions Hoëdebeke qui réunit des textes de Proust et des photos d’Eugène Atget, dans une réédition de 1963 précédemment parue aux États-Unis.Les textes de Proust tirés d’A la recherche du temps perdu viennent interpréter les photos d’Eugène Atget qui passa la seconde partie de sa vie à photographier le Paris du début du XXe siècle.
On ne sait pas grand chose de sa vie sinon qu’il est mort dans le plus grand dénuement, sans avoir connu la renommée qu’il méritait, en laissant une œuvre importante rachetée en partie par Berenice Abbot, assistante pour un temps de Man Ray qui vivait alors à Paris et qui lui voua une grande admiration. Il ne cessa jamais d’associer son travail à ses expositions pour lui faire connaître une gloire posthume.
Ici encore des correspondances s’établissent et l’on rapproche souvent le travail photographique qu’elle fit de la ville de New-York dans les années trente intitulé Changing New York du projet d’Atget dont le but était selon ses propres termes de constituer « une collection de tout ce qu’il y avait d’artistique et de pittoresque à Paris et dans ces environs ».
Car c’est bien de changement dont nous parle la photographie et du pouvoir d’arrêter le temps l’espace d’un instant, ce qui fut également le travail d’écriture de toute une vie pour Marcel Proust.
Correspondances, résonances, à l’ère d’Internet et des Iphones, comme il est bon de prendre le temps de feuilleter un livre et de ne pas oublier nos maîtres.
La Médiathèque Jean-Macé vous présente durant tout le mois de novembre une exposition de nos dernières acquisitions de livres de photographies.
Pour plus d’informations sur la vie et le travail d’Eugène Atget, vous pouvez également consulter l’exposition virtuelle qui lui est consacrée.
Nathalie G.
Derniers articles parNathalie G. (voir tous)
- Ecriture ? Ecritures ! - 6 octobre 2016
- Rendez-vous aux jardins 2015 : Maman, c’est quand la saison des poires ? - 5 mai 2015
- De délicieux sortilèges vous attendent à Borny - 18 mai 2014
11 novembre 2012 à 6 h 31 min ·
Atget nous relie à nos aïeux. Provinciaux, étrangers, parisiens ? On a tous dans un coin de l’oreille le récit d’un parent à la capitale. Et alors, c’était comment ? Notre bibliothèque personnelle de souvenirs et d »images est un peu limitée. Celles d’Atget nous permettent une documentation de repères, on borne d’avant à maintenant, et le contexte des souvenirs narrés est là, entre deux.
C’est le récit de la grand-tante modiste à Pantin et ses innombrables maris, dont le ‘fort des Halles’, puis mon père hébergé chez eux pour ses études , l’époque des zazous, la fin des fortifs, le dimanche aux guinguettes, le ptit blanc à la Villette … Impossible de retrouver une once de cette réalité dans le Paris contemporain, alors Atget au Carnavalet, on y file ! On retrouve les fortifs avec Casque d’Or, mais Atget permet de se régaler de foule de ‘petits métiers’ et d’espaces non aseptisés, non encore muséifiés. Les photos des cabarets en feront rêver plus d’un ;-)) Et vous, que vous a t on raconté de ce Paris ancien ?