Alors que les médias rappellent la catastrophe de Fukushima survenue il y a un an, alors que Paris organise son prochain Salon du Livre et met à l’honneur de nombreux auteurs japonais, alors que les personnages emblématiques des mangas se multiplient à l’envi, alors que le sushi devient tendance dans les menus, alors que la méditation zen est devenue une évidence, alors que les entreprises japonaises rivalisent d’ingéniosité pour révolutionner les jeux vidéo, alors que le look branché des jeunes intéresse la mode occidentale, les Bibliothèques-Médiathèques de Metz, elles-aussi, se mettent à l’heure nipponne. Du 1er mars au 25 avril, l’Espace Intermedio de la Médiathèque Jean-Macé est entièrement consacré à la culture japonaise !
À cette occasion, de nombreux romans, des haïkus, des essais variés (historiques, sociologiques ou religieux), de très beaux livres d’art sont mis en valeur. Des documents sur l’origami, l’ikebana, les jardins zen, la célébration du thé, les arts martiaux, la cuisine japonaise sont proposés pour les goûts de chacun. De même, des mangas sont présentés pour petits et grands, des illustrations d’albums, des contes et des chansons enfantines mais aussi de la musique traditionnelle, et enfin, un choix très important de films concernant le Japon.
La richesse et la diversité de cette culture est impressionnante : si vous êtes d’un naturel curieux, si vous vous intéressez à l’Extrême-Orient et si vous pensez que le raffinement est une qualité intrinsèque au Japon, vous serez guidés spontanément vers cet Espace Intermedio.
Balade onirique…
Hier soir, au fond de mon lit, je refermais le dernier roman de H. Murakami 1Q84, paru aux éditions Belfond (j’avais adoré Kafka contre le rivage, Belfond, 2006) et je somnolais dans la veine hypnotique de cet auteur, à la faveur de la nuit tombée. Étrangement, je me suis sentie happée dans une sorte de rêve, entre passé et présent, entre le Japon d’hier et celui d’aujourd’hui, le Japon surgissait dans mon imaginaire par clichés juxtaposés et impressions furtives mais tenaces :
Une voix me soufflait ce petit poème :
Rêve fou, rieur
Évanescence du jour
Bonheur intemporel
Portée par ce semblant de haïku, calligraphié dans ma mémoire, je me voyais déambuler sous des cerisiers en fleurs, mes socques claquaient discrètement et mon kimono bruissait à chaque pas… Je rencontrais un maître de cérémonie qui m’invitait à m’assoir dans une maison de thé. Je buvais silencieusement un thé brûlant et à travers la fumée qui s’échappait de mon bol en céramique raku, je m’évaporais, à mon insu, vers le Mont Fuji.
Je l’escaladai vaillamment, tout en admirant les couleurs de ce paysage grandiose. Sur l’autre versant, je croisais des samouraïs légendaires, quelques geishas apprêtées et un jeune homme qui s’entraînait au tir à l’arc. Non loin de là, j’aperçus un temple, je m’approchais, pensant trouver quelques moines en méditation mais je découvris un vieil homme à la longue barbe blanche qui enseignait l’art de l’aïkido à des novices figés au sol. Une fumée d’encens enveloppait de nombreuses statuettes de Bouddha et s’échappait en volutes opaques vers moi, je pus donc continuer cette balade onirique à ma guise.
Je voyageais librement par monts et par vaux, m’extasiant devant les jardins zen, m’abreuvant à la spiritualité ambiante. Je m’évertuais à communiquer avec les bonzaïs tortueux, les sources claires me soufflaient des secrets de longévité. Une vapeur diffuse m’enveloppait tout à fait et je vis soudain des estampes par centaines, qui tombaient du ciel et se déroulaient en cadence autour de moi, j’accélérais le pas mais la brume du soir s’épaississait peu à peu, je ne savais plus où j’étais, qui j’étais…
J’entendais des frappes puissantes et me retrouvais, abasourdie, devant deux sumos qui luttaient. Je m’enfuis prestement mais trois femmes élégantes stoppèrent ma course. Elles tenaient des fleurs dans leurs bras et me convièrent à leur fête. Elles préparaient des bouquets, pliaient du papier de toutes les couleurs, elles s’installèrent devant un spectacle de théâtre éblouissant. Les masques blancs se mirent à grimacer, des yeux courroucés me fixèrent intensément et je m’évanouis.
Plus tard, je disparaissais dans les profondeurs de l’esprit, des êtres surnaturels m’accompagnaient et me chantaient des hymnes à la nature, m’expliquaient le principe d’impermanence, me donnèrent à choisir entre une courte vie idyllique ou sept longues épreuves sur le chemin de l’éternité…
Je crois que je m’ébroue enfin d’un long périple, j’imagine que je me réveille complètement, je sens que je suis affamée. Oui, j’ai dû somnoler longtemps, je me lève et vais manger du tofu avec des algues, je dépose ainsi quelques yens sur la table de restaurant de Kyoto.
Je sens un objet qui glisse à terre, le livre de Murakami tombe au pied de mon lit… Ouf !
Pour aller plus loin, voici une playlist d’artistes japonais, de Ryuichi Sakamoto à Jun Miyake:
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