19 ans : cela aura été le temps nécessaire à Tuscaloosa, groupe nancéo-longovicien, pour hanter à nouveau l’espace musical.
Non pas une absence par fuite du temps, mais une distance voulue pour assembler, ordonner, former des concrétions spectrales et des continuums représentatifs du temps passé jusqu’aux prémices de l’invention d’un futur incertain.
Car il est bien question d’histoires, de bassins industriels et de paradis perdus dans ce deuxième album : Comme une guerre froide résonne à coup de désillusions, de noirceurs mélangées à une honnêteté viscérale dans les textes. Précis. Ciselés. Un vortex de lieux, de mémoires auquel se greffe une ligne de saxophone qui va perturber cette mécanique désormais moins fluide.
Parti en trio dans les années 90, le groupe se présente désormais en quintet, Antoine Arlot (saxophone) et Nicolas Valette (guitare) ayant intégré le combo d’origine composé de Vincent Colonna (guitares), Franck Dupont (voix, basse, guitares) et David Soro (batterie, percussions).
Cet EP comporte 7 titres, naviguant entre spleen et recherche d’idéal. En épicentre, une trame transformant l’angoisse en délice, comme dans le titre Avec elle au moins, où l’ambiance éthérée ressemble plutôt à des reflets d’une pop légère stagnant dans une eau contaminée au plomb.
Cependant, certains titres (Mistaken, Quelque chose est arrivé), pêchent par un excès d’influence (Joy Division, Sonic Youth) et une singularité qui trouve difficilement sa place ; prendre des risques deviendrait un défi presque nécessaire dans chaque morceau de l’album : incontestablement, le titre phare et emblématique de l’album est Comme une guerre froide, qui nous électrise durant neuf minutes : définitivement chamanique, ce concentré de tension grandit graduellement et s’élève grâce à une approche free des plus percutantes.
19 ans d’attente, on en attend moins pour le prochain album de Tuscaloosa. Après Comme une guerre froide, l’adolescence passé, le chemin est tracé pour se diriger vers des récifs et des ravins passionnants d’inventivités et de richesses sonores : la voie est définitivement ouverte, tout est possible à présent.
https://tuscaloosa.bandcamp.com/
Maryll R.
Derniers articles parMaryll R. (voir tous)
- CHAIR, ecstatic nihilism - 2 novembre 2019
- (Ré)écouter l’ensemble vocal Métamorphoses - 14 juin 2018
- Musiweb #2 - 2 juin 2017
