C’est une belle figure féminine qui illustre l’exposition Grandeurs Figées, passée récemment du Musée de la Cour d’Or à l’espace Mezzanine de l’aéroport Metz-Nancy-Lorraine. Ce visage avenant, sculpté dans un buste où la passion se mêle à la sobriété, est celui d’Amable TASTU, une de nos Figures de Metz©.
Née Sabine Casimire Amable VOÏART en 1795, elle manifeste très tôt le goût des vers, mais souhaite laisser à ses poèmes un caractère confidentiel. C’est son père qui trahit sa volonté en envoyant « Le Narcisse » au Mercure, une revue dont l’imprimeur est un certain Joseph TASTU. Emerveillé, ce dernier demande qui est l’auteur du poème. Et peu de temps après, il fait la connaissance de la poétesse messine, qu’il épouse en 1816.
Joseph TASTU étant imprimeur à Perpignan, le jeune couple part vivre quelque temps dans la cité catalane. C’est là qu’Amable met au monde, en 1817, son fils Eugène. Peu de temps après, le ménage décide de s’installer à Paris. L’environnement culturel et artistique de la capitale s’avère bénéfique à la jeune poétesse.
C’est sous le nom d’Amable TASTU que paraît en 1826 son premier recueil de vers, Poésies, imprimé par son mari. Elle y révèle une sensibilité et une voix singulières, une authentique vocation de poète. Dans le poème « Scènes du passé », elle trouve des accents touchants pour évoquer ses souvenirs de jeunesse, en célébrant les paysages messins de son enfance sur un ton de nostalgie douce-amère :
Verts gazons où fleurit la blanche marguerite,
Ombrages qu’au printemps la violette habite,
Vallons, bocage, humble sentier,
Dont la mousse reçoit cette pluie argentine,
Qui tombe au gré des vents, du front de l’aubépine
Ou des rameaux de l’églantier;
Prés, dont mes jeunes pas foulaient l’herbe penchée,
Bosquets d’arbustes verts, où la source cachée,
Jaillit loin des yeux du passant,
Où la brise d’avril, d’une aile printanière,
M’apportait en fuyant à travers la clairière,
L’odeur du feuillage naissant ;
Bords féconds et chéris, frais et riant théâtre,
Où la lyre à la main, ma jeunesse folâtre
Ouvrit le drame de mes jours.
Parfois, quand du sommeil mes nuits sont délaissées,
Votre image s’éveille, et des scènes passées
Je crois recommencer le cours.
Je revois tour à tour la penchante colline
Dont l’invisible écho, de ma voix enfantine,
A répété les premiers airs ;
Cet enclos ombragé cher aux plaisirs rustiques,
Et de ceux que j’aimais les ombres fantastiques
Peuplent encor ses bancs déserts.
En rendant à Metz cet hommage pudique (le nom de la ville n’apparaît pas), Amable lui exprime sa gratitude de l’avoir éveillée à la poésie. La verdure des parcs baignés par la Moselle, la douceur campagnarde quasi idyllique de la Lorraine, les promenades rêveuses dans les ruelles, ont ouvert son cœur à l’inspiration poétique. C’est sous les aspects variés de la « ville-jardin » que les réminiscences de Metz lui sont les plus vives, les plus prégnantes.
Cette reconnaissance sincère, elle la garda toujours dans son cœur, au cours d’une vie riche en ouvrages, et aussi en voyages qui la mèneront dans de lointaines contrées. C’est ce que nous découvrirons dans la deuxième partie de ce triptyque.
Nicolas J.
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3 décembre 2015 à 16 h 12 min ·
Merci pour cette découverte. D’autant plus touchant que je cherchais actuellement une personnalité féminine (messine si possible) ayant marqué de son empreinte le territoire mosellan. Bien qu’ici cette demoiselle Amable Tastu souhaitait gardé l’anonymat… Merci donc à vous de nous faire découvrir ces pépites…
24 avril 2018 à 15 h 53 min ·
QUELLE MERVEILLEUSE POÉTESSE « ÂME SENSIBLE S’ABSTENIR » (TRAIT D’HUMOUR) ! DE LIRE ET RE-LIRE QUELQUES BRIDES DE POÉMES SUR LE NET, M’ONT APPORTÉS SES PETITS FRISSONS QUE J’AVAIS CONNU ÉTANT ENFANT QUAND NOUS APPRENIONS EN ÉCOLE PRIMAIRE TOUS CES BEAUX AUTEURS. JE ME SOUVIENS D’AVOIR APPRIS UN DE CES POÉME… JE RETROUVE LE GOUT ET LES SENTEURS SI CHÈRES DE NOTRE ENFANCE DES BELLES PHRASES ET DES ENVOLÉES LYRIQUES; AUQUELLES NOS INSTITUTEURS (TRICES) TENAIENT ABSOLUMENT A CE QUE NOUS LES RESPECTIONS.
JE COURS DE CE PAS CHERCHER UN RECUEIL DES SES POÉSIES, POUR AVOIR A NOUVEAU CE DOUX FRISSON QUI SE NOUE AU CREUX DE L’ESTOMAC ET ME FAIT SALIVER COMME UN BONBON SUCRÉ.
J’AIME TROP CET ENCHANTEMENT QUE ME PROCURE AMABLE TASTU.
Dominique