Et si vous deviez exposer la pochette de votre disque de chevet, quel choix feriez-vous ? Dans le cadre du Mois du Vinyle, nous avons demandé à des mélomanes messins de ne retenir qu’un disque, issu de leur collection de 33T personnelle ! Exercice compliqué, mais très vite, un souvenir, une anecdote, une vibration unique refont surface. Le choix est fait ! Une vingtaine de participants, emballés, ont déposé leur disque fétiche, que le public a pu découvrir dans la Galerie de Verlaine du 1er au 30 avril 2017.
Certaines pochettes vous seront familières, par leur visuel saisissant, par la réminiscence de leur contenu intemporel. D’autres seront sans doute des découvertes, des pépites tombées dans l’oubli. A l’instar de Michka Assayas qui, dans sa préface du livre « Les 1001 albums qu’il faut avoir écoutés dans sa vie » (sorti en 2005), dit « ne jamais passer devant sa collection de disques en vinyle sans un frisson », nous espérons que ce parcours musical vous donnera envie de découvrir certains des albums exposés, voire de compléter votre discothèque personnelle.
À une période où la musique se consomme de manière dématérialisée, le public (re)découvre le support vinyle : la bonne vieille galette de plastique noir réintroduit la matérialité oubliée par le format MP3. Elle se fait expérience globale où quasiment tous les sens sont impactés : on regarde, on touche (une pochette), on écoute (un disque vinyle). Exposer des pochettes de 33T revient aussi -et surtout- à parler musique sous le prisme du visuel : créatives, esthétiques ou artistiques, les pochettes nous renseignent sur une époque, sur l’air du temps, sur une décennie. Le virtuel et la dématérialisation n’ont pas encore trouvé leur… pochette ; ce qui rend ses lettres de noblesse au disque vinyle, pour le plus grand plaisir de tous.
Laissons à présent les mélomanes nous parler de leur disque !
(Cliquer sur les pochettes pour les découvrir en grand. Utiliser les flèches du clavier pour les faire défiler)
Music for the jilted generation
The Prodigy
(1994, XL recordings)
« Cet album, c’est une boule d’énergie brute, à la croisée des genres : breakbeat, jungle, rave et parsemé de samples rock…une vraie bombe pour moi en pleine période grunge. un morceau comme Poison n’a pas pris une ride, une espèce d’hip hop sombre, narcotique et mutant : un classique. »
Le disque de Cédric B
Come on feel the Illinoise
Sufjan Stevens
(2005, Asthmatic Kityy records)
« Orchestrations florissantes, arrangements somptueux, harmonies vocales lumineuses, cet ambitieux voyage à travers l’histoire d’un état américain est porté par la voix céleste et bouleversante du plus grand songwriter de l’époque. »
Le disque de Céline K
Bryter layter
Nick Drake
(1971, Island records)
« Il est des disques qu’on reçoit en pleine poire. Au siècle dernier, étudiante, je dus attendre plusieurs semaines avant de pouvoir acquérir un coffret de réédition des albums de Nick Drake, dont je n’avais jamais entendu une note, mais dont les gens de confiance disaient des merveilles. Je me souviens qu’il y a eu un avant et un après, de l’onde de choc esthétique, et je remercie les passeurs et autres oiseaux rares, on ne leur dit pas assez tout ce qu’on leur doit. »
Le disque de Christophe P
Forever changes
Love
(1967, Elektra records)
« Secret de 1967 transmis de bouche à oreille avant l’ère des CD et d’internet, il eut néanmoins une influence considérable sur des générations de musiciens.
Fiévreux et raffiné (cordes, cuivres), il reliait influences bluesy & garage du leader torturé Arthur Lee, aspirations élégiaques et folk-rock de Bryan McLean, et territoires alors encore inexplorés : guitares flamencos, trompettes mariachis, Prokofiev… »
Le disque de Christophe S
Tragic Figure
Savage Republic
(1982, Independent Project Records)
« Premier album du collectif post-punk-industriel-tribal de Los Angeles. Écouté avec un ami quand j’avais 18 ans lors du passage à la nouvelle année, nous décidions la nuit même de monter notre propre groupe et, nous rendant dans une zone désaffectée, mettions directement nos plans à exécution à coup de barres métalliques sur des barils abandonnés. »
Le disque de Chrystelle C
Caught Up
Millie Jackson
(1974, Spring)
« C’est un concept-album, qui raconte une histoire à deux protagonistes. Il relate la vie d’une femme mariée trompée, et bascule régulièrement du point de vue de la maîtresse. Millie Jackson sortira l’année suivante une suite nommée Still Caught Up (toujours produit par Shapiro, chez Spring record ). Naviguant entre spoken, soul et funk, il lui vaudra une réputation sulfureuse, et restera le point d’orgue de sa carrière. Assez peu connu en France, cet album sera disque d’or en 1975, après avoir été classé 4 ° au Top R&B/Hip-Hop Albums et 21e au Billboard 200″
Le disque de Eva G
Pottymouth
Bratmobile
(1993/Kill Rock Stars)
« This summer’s going to be a girl riot … La meilleure chose qui puisse arriver à un(e) adolescent(e) : écouter et entendre un disque de riot grrrl. »
Le disque de Fabien D
Bass Odyssey
Monk Montgomery
« J’ai découvert cet album de Monk Montgomery en cherchant à écouter des enregistrements live de Wes (le plus connu des ses deux frères). Et là je m’arrête sur le titre Fuselage – part 1 et sa ligne de basse funk que je m’empresse de décrypter pour la jouer. Quelques temps après, j’achetai le LP en Angleterre. Pour l’écouter et le ré-écouter encore, me laissant embarquer à chaque fois dans cette odysée de basse avec un plaisir égal. »
Le disque de Florian S
A Blaze in the northen sky
Darkthrone
(1992, Peaceville Records)
« Ce n’est pas tant pour la musique, contenant toute l’essence du black metal le plus cru et primitif, que pour la pochette que j’ai choisi ce disque. Cette photo hante mes nuits depuis le jour où j’ai posé mes yeux sur elle. D’ailleurs, j’ai découvert son secret il n’y a pas très longtemps… »
Le disque de Hervé J
The Geese and the Ghost
Anthony Philips
(1977, Virgin Records)
« En 1977, quand on a 14 ans, on n’est pas censé écouter ce genre de disque. On me l’a offert par erreur et je l’ai mis de côté pour plus tard. La re-découverte fût un moment magique : ce disque est intemporel et toujours aussi envoûtant. Mon n°1 depuis plus de 35 ans. »
Le disque de Jean-Luc E
Rock Bottom
Robert Wyatt
(1974, Virgin records)
« Ce disque est un météore tombé d’on ne sait où. Robert Wyatt y reste émouvant (Alifib). Sa voix d’ange surgit des profondeurs de l’âme. Devenu MON album de chevet, ce dernier ne vieillit pas. Chaque écoute est une redécouverte. Il reste au Rock sophistiqué des 70’s, ce que le Requiem de Mozart restera au Classique. »
Le disque de Laurence B
Crache ton venin
Téléphone
(1979, EMI)
« Cet album est sorti en 1979, j’avais 13 ans, l’esprit un peu rebelle et j’aimais déjà le rock hurlant ! « Crache ton venin« , le premier morceau donne d’ailleurs le ton. Très rock, très musclé ! Tout l’album reflète la contestation, la révolte avec des riffs électriques qui me faisaient vibrer. Un pur moment de plaisir. Évidemment, le titre qui reste incontournable et que je préférais, c’est La bombe humaine. »
Le disque de Michèle
Fort Worth Teen Scene! Vol. 3
(2004, Norton Rcords)
« Une belle rencontre au Texas avec les créateurs de Fort Worth Teen Scene, thanx to Norton Records and my very specials friends David Campbell, Miriam Linna and Billy Miller, love for ever. »
Le disque de Olivier J
C’est toujours ça de gagné
Kambrones
(1982, Mix records)
« On dit que l’espoir fait vivre,
la réalité ça fait crever,
si je meurs ivre,
ce sera ça d’gagné ! »
Le disque de Pascal L
Bonded by Blood
Exodus
(1985, Torrid Records)
« Sorti un an et demi après le fameux Kill’ em all de Metallica (mais enregistré dès juillet 1984), ce premier LP d’Exodus, groupe californien, est considéré comme un monument fondateur du speed/thrash metal. »
Le disque de Romain L
Songs of love and hate
Léonard Cohen
(1971, Columbia Records)
« Chaque titre de cet album est un pur joyau, désespéré mais lumineux, triste mais hilare comme sur la pochette. Mon album préféré de Cohen. Chaque texte devrait être publié, traduit, déclamé et commenté. Chaque chanson jouée le matin sur les radios. Il y aurait des accidents, des divorces, des démissions, des cris, des pleurs, de la joie, des naissances et des lendemains éclatants. »
Le disque de Sébastien
Kind of blue
Miles Davis
(1959, Columbia records)
« Parce que c’est l’album qui m’a fait entrer dans le jazz. Parce qu’après la 1000ème écoute j’ai toujours la même émotion, les mêmes frissons, la même sensation de « décoller » dès les premières notes de piano de Bill Evans. Parce qu’il y a John Coltrane. Parce que je lui ai accordé les écoutes les plus attentives et mes meilleurs siestes. Parce que je pourrais l’écouter éternellement. »
Le disque de Sylvain M
Tales of Kidd Funkadelic
Funkadelic
(1976, Westbound Records)
« D’après les spécialistes, ce n’est pas le meilleur album de Clinton, mais pour moi il fait partie des meilleurs albums parce qu’il rassemble tout l’esprit » Clintonien ». Il est le premier album avec un jeune guitariste à l’époque, du nom de Mickaël Hampton… le son dévastateur du Moog de Bernie Worrell y est très présent et les voix sont utilisées comme des instruments. Il regroupe tout ce j’aime chez Funkadelik avec un son proche de Parliament. »
Le disque de Thierry D
Dirty Rotten LP
Dirty Rotten Imbeciles
(1983, Rotten Records)
« Tout va trop vite chez D.R.I. ! Le groupe démarre en mai 1982 dans la maison des parents, donne ses premiers concerts en juillet et auto-produit son disque deux mois plus tard dans un garage insonorisé avec des boîtes à œufs. Deux ans plus tard, toute cette scène punk hardcore américaine aura disparu, laissant la place à des déclinaisons plus présentables et vendeuses de la teenage angst. Dirty Rotten LP est un brûlot indépassable de rage adolescente et de vitesse. »
Le disque de Véronique
Steeve Mc Queen
Prefab Sprout
(1988/Epic Records)
« La sensibilité à fleur de peau du combo anglais a longtemps hanté la fan des Beatles que j’étais. Je décelai dans leur univers une voix (voie) qui ne cessa de m’aiguiller vers tout un éventail de groupes (anglo-saxons d’abord) à la démarche dite indépendante : The Pale Fountains, The Lotus Eaters, puis le graal avec The Smiths… »
Le disque de Yves D
The Village Green preservation society
The Kinks
(1968, Pye Records)
« En 1964, à LA question « plutôt Beatles ou plutôt Stones ?? », pour jouer les connaisseurs, je répondais « plutôt Kinks« . Mon amour pour ce groupe a commencé là. Village Green est arrivé à la fin de 1968, tellement différent de tout ce que l’on avait pu entendre, la célébration de toute l’histoire de l’Angleterre en 15 titres tous plus majestueux les uns que les autres. »
Retour en images sur la présentation des vinyles par les participants (© Photographies de Fabien Darley) :
Véronique D.
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