Antoine Louis en tête à tête

ANTOINE_LOUIS---Coll-BM-MetzL’édition régionale du Point (30 mai 2013) consacrait à Metz un dossier de 28 pages intitulé « Metz côté crimes » ; l’évocation des derniers condamnés à mort par la Cour de Metz comportait un encart où il était rappelé que la guillotine (appelée pendant un temps la Louison ou la Louisette) avait été inventée par le chirurgien messin Antoine Louis (1723-1792).

En fait, ce dispositif de décapitation est connu depuis le 16e siècle au moins, il a seulement été perfectionné à la fin du 18e siècle dans un souci humanitaire visant à rendre plus rapide l’exécution du condamné, sans qu’elle soit accompagnée de tortures diverses, et à réduire au minimum la défaillance ou l’incompétence de certains exécuteurs des Hautes-Œuvres. Les annales judiciaires de l’Ancien Régime sont en effet pleines de ces exécutions s’achevant dans d’ignobles boucheries (Louis ose le terme « hacherie ») dont l’horreur dépasse l’imagination la plus sadique.

Antoine-LOUIS---Rapport-sur-la-décapitation---Coll. BM Metz

La principale contribution d’Antoine Louis, physiologiste attentif et par ailleurs expert reconnu en médecine légale, fut donc – après que l’Assemblée nationale constituante eut décidé qu’à l’exclusion de tout autre procédé « tout condamné à mort aura la tête tranchée » – de proposer en mars 1792 de biseauter la lame du couteau, après de multiples essais sur des moutons vivants et des cadavres humains. On sait que le gouvernement révolutionnaire de la France fit, de 1792 à 1795, un usage excessif du « rasoir national ».

Consultation-de-M.-Louis---Coll.-BM-MetzLes collections patrimoniales de la Médiathèque Verlaine (Pontiffroy) conservent, depuis 1835 au moins, une grande part des archives du docteur Louis, mort en mai 1792, chirurgien en chef de la Salpêtrière . Soit quelque 221 liasses manuscrites (BM manuscrits 1308-1326 et 1876-1879), plus quelques-unes imprimées, contenant notamment les 31 leçons de son cours de physiologie, son cours sur l’hygiène, sur les pathologies externes et internes, 62 consultations médicolégales, 136 consultations médicales, divers articles et contributions destinés au Journal de Trévoux, au Journal de médecine, ou autre Gazette sanitaire, mais aussi à l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert (dont il rédigea tous les articles traitant de chirurgie), ainsi que son journal de praticien dans les hôpitaux et à l’armée… Relevons parmi les communications qu’il fit parvenir à l’Académie de Metz, une étude sur l’art d’engraisser le bétail par l’insufflation d’air qui n’est pas sans rappeler certaines pratiques actuelles de l’agro-alimentaire ; le rapport qu’il fit au comité de législation sur la décollation ou l’action de la guillotine y est également conservé. Dans le Mémoire ci-dessous, Louis étudie, à propos de l’affaire Calas survenue l’année précédente (en même temps que Voltaire s’en saisit avec son Traité sur la Tolérance), la façon de prouver si une pendaison résulte d’un crime ou d’un assassinat.

On sait moins que pour le Grand salon du nouvel Hôtel de ville de Metz (1772), Antoine Louis fit réaliser par un sculpteur parisien demeuré inconnu, dix médaillons de marbre blanc représentant  les Messins qui, depuis le milieu du 16e siècle, s’étaient particulièrement illustrés dans le domaine des arts, de la médecine, de la jurisprudence ou de la  religion. La municipalité,  pour lui témoigner sa gratitude, lui proposa en mai 1779 d’y faire figurer à la suite son propre portait. Louis fit alors exécuter le médaillon du maître échevin Lançon (mort en 1769) pour servir de pendant au sien,  puis en 1788, y ajouta celui de Pilâtre de Rozier, le premier aérostier, mort en 1785.

« 17 avril 1792 : premier essai de la guillotine… »
Cliquez ici pour (ré)écouter cette émission sur France Inter (17 avril 2014).

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Pierre-Édouard W.

Conservateur - Bibliothèques-Médiathèques de Metz

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