Si, dans l’histoire de la France et de l’Europe, l’année 1815 est marquée par la défaite de Waterloo, la chute de Napoléon et le congrès de Vienne qui reconfigura le continent européen au profit des vainqueurs, elle l’est aussi par un double événement qui, indirectement, touche l’histoire de la Moselle : la perte de Sarrelouis par le traité de Paris du 20 novembre et, le 7 décembre 1815, l’exécution du maréchal Ney, qui avait vu le jour dans cette ville le 10 janvier 1769. La mort du « brave des braves » clôt d’une manière tragique cette terrible année 1815, comme si un point d’exclamation rouge-sang éclaboussait la fin de l’épopée napoléonienne.
Il nous a paru opportun, en cette année 2015, de faire revivre en parallèle le double destin de la ville de Sarrelouis, qui fut française de 1680 à 1815, et de l’un de ses plus glorieux enfants, Michel Ney, dont la célèbre statue de Charles Pêtre domine depuis 1860 l’Esplanade et la place de la République, au cœur de Metz. Celui dont Napoléon avait fait le duc d’Elchingen et le prince de la Moskowa semble toujours veiller sur la ville où il revêtit pour la première fois l’uniforme, sans grade, dans le régiment Colonel-Général-Hussards, le 6 décembre 1788, avant de connaitre la destinée exceptionnelle que l’on sait.
Ney est indissociable de l’histoire de la ville qui l’a vu naître, Sarrelouis, cette place-forte aux confins du royaume de France, créée de toutes pièces en 1680 par Louis XIV et Vauban sur les rives de la Sarre ; une vocation qui va en faire une véritable pépinière de soldats dans lesquelles vont puiser les armées de la République et la Grande Armée, et leur donner de grands officiers comme les généraux Laurent Schobert, Michel Reneauld, Jean-François Toussaint et surtout les deux frères Grenier, Paul et Jean-Georges, mais aussi le lieutenant-colonel Jean-Baptiste Chartener et le chef d’escadron Louis Leintenschneider, et bien d’autres encore. Michel Ney est bien sûr la figure emblématique de ces soldats sarrois, et sa mort quelques semaines seulement après que sa ville natale a été ravie à la France semble être un de ces coups du destin dont l’Histoire a le secret.
On peut imaginer, ce matin du 7 décembre 1815, dans la voiture qui l’emmène de sa cellule du palais du Luxembourg au lieu de l’exécution, avenue de l’Observatoire, Michel Ney revivre en fulgurance les grandes étapes de sa vie, qui s’achève à l’aube de ses 47 ans. Sans doute a-t-il le temps de revoir son enfance et sa jeunesse à Sarrelouis, ses études au collège des Augustins, ses débuts comme clerc de notaire, puis comme employé dans les mines et les forges de la région ; son engagement comme hussard à Metz, ses campagnes dans les guerres de la Révolution (a-t-il regretté de n’être pas à Valmy le 20 septembre 1792) ? Déjà on le surnomme « l’infatigable », « Michel le rouge » (il est roux). Sans doute revit-il la gloire acquise sur les champs de bataille d’Europe, gloire qui fait de lui un général de brigade en 1796, un général de division en 1799, et enfin, par la grâce de l’empereur, l’un des 18 maréchaux de la grande promotion impériale de 1804.
Peut-être Michel Ney, au moment où il descend de la voiture et qu’on le conduit face au peloton d’exécution, revoit-il les chevauchées de l’épopée impériale, des grandes batailles jusqu’au désastre final de Russie, où lui-même n’a pas démérité? Les Cent-Jours, la promesse à Louis XVIII de ramener l’usurpateur dans une cage de fer, le ralliement à Napoléon, Waterloo, et l’infâme procès qu’on vient de lui faire?
À n’en pas douter, tout cela, en quelques minutes, apaise et prépare Michel Ney à recevoir les balles du peloton d’exécution, le temps qu’il crie : « Camarades, tirez sur moi et visez juste ! »
Rendez-vous le samedi 28 février à 15h dans la Salle Mutelet de la Médiathèque Verlaine (Pontiffroy) pour un nouveau Café Curiosité, rendez-vous qui vous invite à venir écouter un spécialiste d’un domaine puis à venir partager café, thé et petites douceurs. Cette fois, Pierre Brasme, docteur en histoire, président-fondateur honoraire de la Société d’Histoire de Woippy et membre de l’Académie nationale de Metz, évoquera 1815.
Pour de plus amples renseignements sur le maréchal Ney , vous pouvez emprunter ces ouvrages:
– KURTZ, H.- Le procès du maréchal Ney – Arthaud, 1964
– HULOT, Frédéric – Le Maréchal Ney – Pygmalion, 2000
– DANSEL, Michel – Maréchal Ney : fusillé ou évadé ? – e-dite, 2004
Parmi les ouvrages les plus récents de Pierre Brasme, consultables dans les BMM:
– Metz et le Pays Messin sous la Révolution, Editions des Paraiges
– Histoire illustrée de la Lorraine, Ouest-France
– L’indésirable, Editions des Paraiges
– Metz et le Pays Messin sous l’Empire, Editions des Paraiges
– Dictionnaire des Révolutionnaires Français, CNRS éditions
Article co-signé par Pierre Brasme et Véronique Philippi.
Véronique P.
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belle histoire qui es rélié à la culture de Metz et de sa région, merci
conrazier r et jacques Durand