Vœux d’abondance

Noël 1356, il y a un peu moins de 660 ans, Charles IV de Luxembourg, roi de Bohème et empereur du Saint-Empire est à Metz. Une cour très nombreuse l’accompagne, plus de trois milles personnes selon les chroniques dont trente-deux cent (3200) éperons d’or c’est-à-dire quelque 1600 chevaliers, sans compter  les seigneurs d’église et les écuyers.

Le Champ à Seille, détail du Portrait de Metz, huile sur toile vers 1600. Musée de la Cour d’Or

Le Champ à Seille, détail du Portrait de Metz, huile sur toile vers 1600. Musée de la Cour d’Or

Aux sept Électeurs et à une bonne partie de la noblesse de l’Empire, il faut ajouter un important contingent venu du Royaume. On y voit notamment l’abbé de Cluny, le duc d’Orléans, le duc de Bretagne, les comtes de Poitiers, d’Etampes, de Tancarville, d’Anjou, le sénéchal de Beaucaire, les archevêques de Rouen, de Sens, le cardinal de Talleyrand-Périgord, par ailleurs confesseur de l’empereur, le vicomte de Melun, Grand Chambellan de France et enfin le Dauphin Charles, duc de Normandie et régent du Royaume pendant la captivité de son père Jean II, fait prisonnier par les Anglais à la bataille de Maupertuis (19 septembre 1356). Il est là pour rendre hommage pour son apanage du Dauphiné qui relève alors de l’Empire. Il est également le filleul de l’empereur, qui est aussi son oncle, puisque ce dernier est le frère de sa mère : Bonne de Luxembourg.

Le bœuf à la broche lors du couronnement de l’empereur Matthias en juin 1612 - Musée Historique de Francfort

Le bœuf à la broche lors du couronnement de l’empereur Matthias en juin 1612 – Musée Historique de Francfort

Le bœuf à la broche lors du couronnement de l’empereur Matthias en juin 1612 - Musée Historique de Francfort

Le bœuf à la broche lors du couronnement de l’empereur Matthias en juin 1612 – Musée Historique de Francfort

La Bulle d’or, publiée à Nuremberg le 10 janvier 1356, règle l’élection du roi des Romains, la réservant, pour éviter toute intervention de la Papauté, aux sept Électeurs ; les droits et les privilèges de chacun d’eux y sont minutieusement décrits. Elle fut complétée, lors de la Diète impériale tenue à Metz à Noël 1356, de plusieurs articles relatifs aux cérémonies du couronnement impérial. Ce fut ainsi l’occasion à Metz, d’une sorte de répétition générale des cérémonies qui au long de cinq siècles et demi eurent lieu à Francfort ; les dispositions protocolaires de la bulle comme constitution du Saint-Empire, ayant été scrupuleusement observées jusqu’à la disparition du Saint-Empire en 1806.

C’est en effet à Metz que pour la première fois sans doute, est fait mention du « gebratene Ochs » du bœuf entier rôti à la broche, mais farci de quantité de menu bétail et de volailles diverses. Les chroniques messines ne manquent pas de relever la nouveauté du plat : « Et au Champasaille (actuelle Place Coislin)  fut tournez le buef en un hatiet (= à la broche); dans le  buef, il y avait ung porc, dans le porc ung chastron (= mouton), dans le chastron une oie, en l’oie une geline, en la geline ung oeufz ». Cette débauche de nourriture devant symboliser l’abondance qui nécessairement accompagnera le nouveau règne, était complétée de fontaines de vin blanc et rouge où chacun puisait à volonté. Par la suite on signalera des montagnes de céréales, des monceaux de  pain frais, des lancers de pièces d’or par centaines dans la foule.

Heureux temps ? L’histoire nous rappelle les épidémies, famines et calamités diverses qui s’abattirent peu après sur l’Europe. En guise de vœux pour 2014, attention aux fallacieuses promesses d’abondance !

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Pierre-Édouard W.

Conservateur - Bibliothèques-Médiathèques de Metz

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